Comptage des positions difficilesDans toutes les règles, les joueurs passent leur tour lorsqu'il n'y a plus aucun point à faire. On retire alors les pierres mortes du goban avant de procéder au comptage...
Ou pas ! Certaines positions assez compliquées peuvent demeurer sur le goban une fois que les deux joueurs ont passé. C'est très rare, mais c'est un cas de figure où les règles française et japonaise peuvent diverger totalement. Au point que certains groupes peuvent être considérés morts dans une règle et vivants dans l'autre ! En règle japonaise, il existe même des cas particuliers de pierres mortes qui ne doivent
pas être retirées du goban !
Après avoir rappelé la position de la règle française, nous ferons une plongée dans les arcanes des règles japonaises en commençant par la traditionnelle, pour introduire la règle officielle de 1949, elle-même indispensable pour comprendre le sens de la règle officielle actuelle... Autant le dire tout de suite pour vous éviter des maux de crâne : il s'agit de la partie la plus complexe, la plus controversée, et la moins utilisée de la règle japonaise.
Si vous ne comptez pas vous-même arbitrer prochainement un tournoi joué en règle japonaise, connaître cette partie n'est vraiment pas indispensable
Règle françaiseLa règle française est simple. Voici ce qu'elle dit :
En cas de désaccord (ce qui est en principe exceptionnel), il suffira de continuer à jouer jusqu'à ce que tous les litiges éventuels soient réglés.Lorsqu'on reprend la partie, c'est toujours à Noir de jouer, puisque le dernier coup est obligatoirement un passe de Blanc. On pourrait objecter que dans le cas où Noir a posé la dernière pierre, ce n'est pas réellement "reprendre la partie", qui se serait normalement poursuivie par un coup de Blanc.
Je pense que cela n'a pas beaucoup d'importance, dans la mesure où, lors des coups précédents, les deux joueurs ont considéré qu'ils pouvaient se permettre de passer sans risque, donc de donner le trait à l'adversaire.
Quant à "régler" les litiges, cela consiste à
capturer effectivement les pierres que l'on prétend être mortes. En effet, n'oublions pas la définition française (et chinoise) du score :
Chaque intersection du territoire d'un joueur lui rapporte un point, ainsi que chacune de ses pierres encore présentes sur le goban.Cette définition, purement réglementaire, fait fi de la notion de vie ou de mort : toutes les pierres présentes valent un point, quel que soit leur statut.
La règle est soigneusement rédigée :
les joueurs pourront, d'un commun accord, retirer du goban les pierres mortes adverses juste avant le décompte des points, sans avoir à rajouter les coups nécessaires à leur capture.Il s'agit d'une
possibilité, non d'une
obligation, et ce, seulement si les deux joueurs sont d'accord.
S'ils ne sont
pas d'accord, alors la règle est simple : toutes les pierres, sans exception, valent un point. A charge pour les joueurs d'éliminer celles qu'ils ne veulent plus voir sur le goban avant de clore la partie.
C'est pour cette raison qu'il est permis, en cas de désaccord, de reprendre la partie.
Une fois les pierres de la discorde éliminées, il faut naturellement passer de nouveau et faire en sorte que blanc joue en dernier.
Règle japonaise traditionnellePhase de confirmation de vie et de mortEn raison du comptage de territoire, les choses sont infiniment plus compliquées en règle japonaise. Premier point : il est impossible de reprendre une partie comme si de rien n'était. Voici pourquoi.
Imaginons que Noir, après le dernier coup de la partie, compte le score mentalement, constate avoir perdu de 1.5 points, et passe son tour.
Blanc passe également et s'apprête, pour commencer le comptage, à retirer une pierre noire morte restée toute seule au beau milieu d'un solide territoire blanc.
Noir s'écrie alors "Stop ! Ne retire pas cette pierre, elle est vivante !
-Ah ça ! Te moquerais-tu de moi ?? répond Blanc.
-Nous ne sommes pas d'accord ? Très bien. Alors appliquons la règle. Reprenons la partie, et prouve-moi que tu peux capturer.
-Eh bien d'accord, je fais atari.
-Je passe
-Donc tu reconnais que ta pierre est morte.
-Non, elle est toujours vivante, je n'ai pas besoin de protéger.
-Alors je la capture.
-Ah oui, tu avais raison, cette pierre était morte ! Bien, comptons les points, à présent."
Bien entendu, avec deux pierres de plus dans son territoire, en règle japonaise, blanc perd la partie de 0.5 points !
Ce procédé ridiculement déloyal, consistant à faire ajouter des pierres à son adversaire jusqu'à ce qu'il ait perdu, est évidemment interdit.
En règle japonaise, quand on prolonge une partie pour établir quels sont les groupes morts et les groupes vivants, on doit revenir à la position initiale pour compter le score.C'est-à-dire que Blanc doit retirer les deux pierres jouées et remettre le prisonnier noir à sa place. La pierre noire est alors considérée comme morte, et le décompte peut commencer. Blanc gagne de 1.5 points.
Selon la tradition, la détermination de la vie et de la mort des groupes se fait sur un second goban, sur lequel on reproduit la partie, afin de conserver sur le premier goban la position exacte qui fait foi pour compter le score. A notre époque, on prend en photo de la partie juste après que les deux joueurs ont passé.
On peut remarquer qu'en règle française, cela ne change rien : retirer les chaînes mortes à la fin ou les capturer effectivement est affaire de pure convention. Alors qu'en règle japonaise, autoriser le retrait des chaînes mortes constitue une règle indispensable : si les joueurs étaient forcés de capturer effectivement les pierres mortes, le score final serait totalement différent en raison des nombreuses pierres qu'il faut ajouter dans son propre territoire pour capturer les groupes adverses morts, tandis que l'adversaire passe son tour. Le nombre de pierres noires et blanches devient complètement différent, et le score de surface et le score de territoire n'ont plus rien à voir.
En règle japonaise, retirer les pierres mortes avant de procéder au comptage est un droit. En règle française, c'est une simple convention.A partir de quand une pierre est-elle morte ?Avec le score de territoire, dans certains cas, on peut être tenté, pour gagner un point, d'omettre un dernier coup à la fin de la partie si on s'aperçoit qu'un de nos groupes n'est pas tuable, ou qu'un groupe adverse est déjà mort. Voici un exemple :
Pio2001_20150323_directko.sgfPas de handicap, pas de prisonniers, komi 6.5 points.
Au coup 8, Noir voit qu'il est mort, et passe. Blanc passe également. Comme on l'a vu, il est interdit de forcer à rajouter des pierres pour capturer ce qui est mort. Les deux joueurs ont passé, la position doit être comptée telle quelle bien que les deux ko (G8 et J9) n'aient pas été résolus.
Si on compte le score dans cette position, Blanc gagne de 0.5 points. Mais Noir ne l'entend pas de cette oreille : il soulève une objection et prétend que la pierre blanche en H9 n'est pas vivante tant que Blanc n'a pas connecté en J9 ! Ou bien Blanc connecte, ou bien H9 est retirée du goban en tant que pierre morte, exige-t-il. Evidemment, c'est dans son intérêt : si Blanc connecte, il perd un point, et perd la partie.
Cet exemple illustre le point de départ de tous les problèmes de la règle japonaise : on ne sait pas définir mathématiquement la notion de vie et de mort. Or, la règle impose de retirer les pierres
mortes sans procéder à leur capture. Comment retirer quelque chose que l'on ne sait pas définir ?
Ce cas de figure restant rare, on se contente de faire appel à l'arbitrage d'une personne dont l'autorité est reconnue. Dans la position ci-dessus, il a été jugé que Blanc devait prendre le ko en G8, puis connecter en H8. Comme cela lui coûte deux points, il perd la partie.
De nombreuses positions similaires, comportant souvent un ko non résolu, ont été arbitrées de la sorte dans des tournois officiels.
Règle japonaise officielle de 1949En 1949, l'académie de go Nihon Ki-in décide de fixer par écrit une fois pour toutes la règle complète du jeu de go. Cette règle comporte une vingtaine de cas particuliers tels que celui ci-dessus, accompagnés du jugement qui a été rendu. Ils sont appelés "précédents".
Il n'existe pas de traduction en anglais ou en français de cette règle, mais grâce à Robert Jasiek, on peut en avoir un bonne approximation en consultant sa page consacrée à la règle japonaise du championnat du monde amateur (1980), qui est paraît-il très proche de la règle officielle de 1949 :
http://home.snafu.de/jasiek/wagcinf.html25 exemples y figurent, correspondant plus ou moins à 14 types de "précédents". Robert y indique la décision à appliquer dans la règle du championnat, ainsi que dans la règle de 1949 lorsqu'elle est différente.
En particulier, dans la partie que l'on a vue ci-dessus, au championnat du monde amateur, Blanc n'a pas à connecter le ko, on exige juste de lui qu'il le recapture. Il ne perd donc qu'un seul point.
Dans la règle japonaise de 1949 (ainsi que dans celle du championnat du monde amateur), après que les deux joueurs ont passé, si l'une des formes indiquées dans la liste des précédents est présente sur le goban, elle doit être comptée comme indiqué dans la règle.Il existe donc une part d'arbitraire dans cette version de la règle japonaise. Et il faut en avoir une copie complète si on veut pouvoir arbitrer tous les cas de figure sans avoir à retenir pas coeur tous les "précédents".
Parmi ces derniers, attardons-nous sur deux cas de figure intéressants. Le premier parce qu'on le rencontre couramment, le second parce qu'il est emblématique des problèmes de règles.
Coups défensifs additionnelsLes coups défensifs tous simples que l'on force l'adversaire à jouer en remplissant les dame ont droit à leur précédent. Dans le texte de la règle, ils sont illustrées par cette figure :
Les pierres marquées d'un X sont mortes, les intersections signalées par un triangle sont les dame, et
les trois intersections notées par les carrés sont celles qu'il est obligatoire de renforcer en ajoutant des pierres.Un cas similaire est apparu dans une partie opposant Go Seigen (Blanc) à Takagawa Shukaku (Noir), alors Honinbo, en 1959, qui s'est soldée par l'impossibilité de déterminer le gagnant.
Pio2001_20150323_SeigenShukaku1959.sgfDans l'esprit de la règle officielle de la Nihon Ki-in de 1949, alors en usage, Blanc devrait ajouter une pierre en N11 pour prouver qu'il vit (intersection marquée d'un A au coup 244), sinon, Noir peut lancer une bataille de ko en M10. Par conséquent, contrairement à ce qu'indique le logiciel, Noir gagne de 0.5 points.
L'argument de Go Seigen pour réclamer ce point était qu'il n'avait jamais été spécifié que la partie devait se jouer selon la règle de la Nihon Ki-in ! Si on applique la règle traditionnelle, les deux joueurs ont passé, donc on compte la position telle quelle. Comme Noir a renoncé à lancer la bataille, l'intersection A est dans le territoire de Blanc.
Les arbitres n'ont pu trancher, et ont demandé aux joueurs de régler la situation eux-mêmes. Plusieurs mois plus tard, Go Seigen a finalement concédé la victoire à son adversaire, mais a demandé en échange que la Nihon Ki-in clarifie sa règle.
Quatre courbés dans le coinL'autre précédent dont je veux vous parler s'appelle les "quatre courbés dans le coin".
Rappelons d'abord le principe de la forme en quatre courbés dans le coin, ou plutôt, de cette figure qui y mène, puisque, à proprement parler, c'est elle qui constitue un problème, et non la forme en quatre courbés proprement dite, qui conduit simplement à un ko.
Noir est mort, mais blanc doit user de ruse pour parvenir à réaliser la capture. S'il sacrifie en quatre en ligne, noir vit, et s'il sacrifie en quatre courbés, cela donne un ko. Blanc doit attendre. Noir est paralysé. Il ne peut rien faire. S'il joue, il se met en atari et se fait capturer.
Blanc finit tranquillement son yose, puis, au lieu de passer, il consolide méthodiquement son territoire jusqu'à ce que noir ne puisse plus jouer aucune menace de ko. Noir passe, passe, et passe, et blanc consolide, consolide, consolide...
Enfin, lorsqu'il n'a plus aucune menace de ko contre lui, il sacrifie en quatre courbés :
Puis il joue au point vital. Si Noir résiste...
Blanc lance le ko. Comme il s'est retiré toute menace possible, il est certain de gagner le ko.
...et blanc 7 capture.
On voit donc que Noir est mort, mais que, en règle japonaise, sa capture peut coûter extrêmement cher à Blanc, car chaque menace de ko à supprimer l'oblige à jouer dans son territoire pendant que l'adversaire passe, donc à perdre un point.
Comme Noir n'a aucun moyen de défendre la position initiale, cette configuration (ainsi qu'une autre version menant au même sacrifice en quatre courbés) reste parfois sur le goban après que les deux joueurs ont passé. Elle figure dans la liste des précédents, et la règle de 1949 dit que
Noir est inconditionnellement mort, indépendamment du reste du goban.On dispense donc Blanc de jouer tous les coups nécessaires à la capture.
Menaces de ko infiniesQue se passe-t-il s'il existe des menaces de ko que Blanc ne peut pas se retirer ? Par exemple un seki à double ko.
Pio2001_20150323_QuatreCourbesTripleKo.sgfLe seki à double ko se comporte comme une menace de ko infinie. Si Blanc voulait lancer la séquence de capture, il se heurterait à un problème : avec le ko des quatre courbés en plus, on obtient une sorte de triple ko global et on tourne en rond indéfiniment. Blanc n'a donc pas intérêt à attaquer, et il passe. Noir ne peut pas défendre de toutes façons.
La question du statut des groupes se pose donc après les deux passes, et ce sont les "précédents" qui font foi. C'est pour cette raison qu'il est bien spécifié que les quatre courbés sont morts
indépendamment du reste du goban. C'est une jurisprudence qui récompense Blanc pour avoir su enfermer Noir dans une forme morte.
La forme vivante morteMais que se passe-t-il s'il existe une menace de ko simple et non supprimable ? Par exemple un seki mettant en jeu un groupe Blanc trop grand pour être sacrifié, mais un groupe Noir assez petit pour être sacrifié ?
Le seki lui-même est une menace de ko non supprimable. Si, à la fin, Noir demandait à Blanc de montrer qu'il peut capturer la forme dans le coin, il serait contraint de lancer la bataille.
A ce moment, Noir sacrifie le seki. Blanc ne peut pas se permettre de perdre son groupe, donc il répond, et Noir reprend le ko.
Si par ailleurs, Noir n'a pas de menace de ko contre lui, il forme deux yeux et vit.
Ici, Noir est mort en règle japonaise, et vivant en règle française.Règle japonaise moderne, 1989Une certaine ambiguïté au sujet de l'attitude à adopter dans des positions telles que celle de la partie Go Seigen - Takagawa Shukaku... des formes vivantes qui sont mortes... une longue liste de cas particuliers à retenir... sans compter la promesse faite à Go Seigen en 1959... tout cela a fini par conduire à une réforme de la règle japonaise du jeu de go. C'est ainsi qu'en 1989, les académies japonaises de go Nihon ki-in et Kansai Ki-in publient conjointement une nouvelle règle officielle qui ne comporte aucun "précédent" et permet d'arbitrer n'importe quelle position.
Tout ce que nous avons vu ci-dessus au sujet de la règle japonaise n'a donc plus cours. Mais la règle de 1989 est si abstraite et si surprenante qu'il était nécessaire de s'imprégner de l'esprit de l'ancienne règle afin de comprendre le sens de la nouvelle. Elle réussit le tour de force de conserver inchangés la plupart des jugements donnés pour chaque précédent. Y compris l'ajout de coups défensifs à l'intérieur de territoires déjà vivants, et les quatre courbés "vivants", qui restent morts !
Deux innovations radicales ont permis d'obtenir ce résultat : déclarer seki toute chaîne possédant un dame, même si elle a deux yeux. C'est en effet le remplissage des dame, coups gratuits en règle japonaise, qui forcent l'adversaire à perdre des points en connectant. Les seki valant zéro points, les joueurs sont obligés de combler les dame pour que leurs groupes n'aient pas le statut de seki et que leurs territoires soient décomptés. Les petits coups défensifs additionnels doivent alors suivre pour éviter la capture.
L'autre innovation consiste à déclarer que tous les ko sont terminés au moment où les deux joueurs passent leur tour. Si une phase de confirmation doit avoir lieu pour déterminer qui est vivant et qui est mort, il y sera strictement interdit de reprendre un ko quel qu'il soit.
Cela règle d'un seul coup tout un tas de problèmes auparavant gérés par des précédents. Et cela interdit au passage de défendre toute forme en quatre courbés dans le coin.
Voici donc le texte de la règle japonaise actuelle, du moins les parties qui nous intéressent (le "commentaire" fait partie de la règle) :
Article 7. Vie et mort1. Les pierres sont dites "vivantes" si elles ne peuvent être capturées par l'adversaire, ou si leur capture permettrait à une nouvelle pierre d'être jouée sans que l'adversaire puisse la capturer. Les pierres qui ne sont pas vivantes sont dites "mortes".
2. Dans la phase de confirmation de vie et de mort après "l'arrêt" de la partie (article 9), il est interdit de reprendre un ko. Un joueur dont la pierre a été capturée dans un ko peut toutefois reprendre ce ko après avoir passé une fois pour cette reprise de ko en particulier.
Article 8. TerritoireLes intersections vides entourées par des pierres vivantes d'un seul joueur sont appelées points-yeux [eye points, intraduisible]. Les autres intersections vides sont appelées dame. Les pierres qui sont vivantes mais possèdent des dame sont dites en seki. Les points-yeux entourés par des pierres qui sont vivantes, mais pas en seki, sont appelées territoire, chaque point-oeil compte pour un point de territoire.
Article 9. Fin de la partie1. Lorsqu'un joueur passe son tour et que son adversaire passe à la suite, la partie "s'arrête".
2. Après "l'arrêt", la partie se "finit" par la confirmation et l'accord des deux joueurs au sujet de la vie et la mort des pierres et du territoire. Ceci est appelé la "fin" de la partie.
3. Si un joueur demande la reprise d'une partie arrêtée, son adversaire doit accepter et a le droit de jouer en premier.
Article 13.1 Les deux joueurs perdent1. Après "l'arrêt" de la partie conformément à l'article 9, si les joueurs trouvent un coup qui changerait le résultat de la partie, et en conséquence ne peuvent se mettre d'accord pour "finir" la partie, les deux joueurs perdent.
Commentaire sur l'Article 8, territoire4. Remplir les dame pour confirmer le territoire
Dans la position du diagramme 15, les groupes noir et blanc sont tous les deux vivants, mais en seki à cause du dame en A, si bien qu'aucun des deux n'a de territoire. Un coup en A est nécessaire pour transformer les yeux de Noir et Blanc en territoire.
Diagramme 15Commentaire sur l'Article 9, fin de la partie, clause 21. La confirmation de la vie et de la mort des pierres et du territoire impose que les joueurs remplissent les dame et ajoutent toute pierre nécessaire à l'intérieur de leur territoire, en accord avec l'article 8.
2. Si les deux joueurs sont d'accord, ils peuvent remplir les dame et ajouter les autres pierres nécessaires après "l'arrêt" de la partie. Dans ce cas, il ne s'agit pas de coups joués au sens des règles, et ils n'ont pas besoin d'être joués selon les règles.
Le texte complet, traduit par James Davies, figure sur le site de Wilfred Hansen :
http://www.cs.cmu.edu/~wjh/go/rules/Japanese.htmlIl comporte de nombreux exemples illustrant les règles, qui ne sont pas toujours faciles à comprendre. Voici les points importants :
- La partie se divise en deux phases. Quand la phase de jeu se termine (les deux joueurs passent, arrêt de la partie), la phase de confirmation commence (fin de la partie).
- Dans la phase de confirmation, pour reprendre un ko, il est inutile de jouer une menace car la reprise restera interdite le coup suivant. Il faut d'abord passer et annoncer pour quel ko on passe. On pourra théoriquement reprendre le coup suivant. Mais en pratique, dès qu'on passe pour un ko, l'adversaire connecte le ko en question. Ce qui a pour effet d'empêcher toute bataille de ko.
- La notion de territoire est bâtie sur une série de définitions qui commence par la définition de la vie, qui est purement opérationnelle : est vivante une pierre qu'on ne peut pas capturer (c'est-à-dire dont l'adversaire peut empêcher la capture en jouant parfaitement). La vie définit ce qu'est un eye-point, un eye-point définit ce qu'est un dame, un dame définit ce qu'est un seki, un seki définit ce qu'est un territoire.
- Le commentaire sur l'article 8 ne laisse absolument aucun doute sur la nouvelle notion de seki et de territoire : avoir deux yeux ne donne aucun point tant qu'il reste des dame non remplis.
- Quand on parle de poser une nouvelle pierre qui ne peut pas être capturée, c'est tout simplement un snapback (une prise en retour). Une pierre qui peut être capturée est donc vivante s'il y a snapback. Le commentaire précise que la notion de snapback est récursive (ça marche aussi pour un snapback de snapback etc).
- Le commentaire sur l'article 13 montre l'exemple d'une forme en 5 avec un point vital, dont le statut dépend du trait. Si le point vital n'a pas été joué, comme c'est l'adversaire qui joue en premier quand on demande la reprise de la partie, personne n'a intérêt à demander la reprise, car l'adversaire tuerait, ou vivrait. Si les joueurs ne sont pas d'accord sur le statut du groupe et ne demandent pas la reprise de la partie, ils perdent tous les deux.
ExemplesCoups défensifsReprenons la figure de la règle de 1949 et appliquons la règle japonaise actuelle. Les deux joueurs ont passé.
Les intersections marquées d'un triangle ne sont pas entourées de pierres vivantes d'un seul joueur. Ce ne sont donc pas pas des eye-points, donc ce sont des dame.
Les chaînes marquées d'un cercle sont en contact avec des dame, donc, ce sont des seki.
Les intersections marquées d'un carré sont entourées par des chaînes vivantes qui sont en seki, donc ce ne sont pas des territoires.
Conformément au commentaire sur l'article 9, on peut remplir les dame de façon informelle. On obtient le résultat suivant :
A présent, les pierres marquées d'un triangle pourraient être capturées. Elles ne sont donc pas vivantes. Donc les intersections marquées d'un carré ne sont pas des territoires. Toujours conformément au commentaire sur l'article 9, on ajoute maintenant, de façon informelle, les "pierres nécessaires" :
Maintenant, toutes les intersections sont entourées de pierres vivantes d'un seul joueur qui ne sont pas en seki. Ce sont enfin des territoires. Pour cela, il a fallu ajouter les trois pierres marquées d'un carré, comme le préconisait la règle de 1949.
Pour la partie Go Seigen - Takagawa Shukaku, si Takagawa Shukaku pense qu'il peut forcer Blanc à ajouter gratuitement une pierre, il peut demander la reprise de la partie conformément à l'article 9.3. Blanc a le trait. Il passe, et Noir peut exécuter sa menace. Je ne vois cependant pas de menace gratuite possible. Si Noir joue sur une intersection qui n'est pas dame, il perd un point.
Quatre courbésLes quatre courbés avec menace de ko indestructible illustrent bien le fonctionnement de la règle officielle japonaise actuelle.
Pio2001_20150323_QuatreCourbes1989b.sgfDans la position indiquée au départ, Noir passe. Blanc ne doit pas tenter de capturer, car il échouerait en raison de la menace de ko que constitue le seki.
Il doit passer afin de faire délibérément basculer la partie en phase de confirmation. Et en effet, en phase de confirmation, Noir n'a pas le droit d'utiliser de menace pour gagner le ko. Conformément à l'article 7.2, il doit passer pour ce ko d'abord. Et Blanc capture.
Ainsi, la règle de 1989 conduit au même résultat que celle de 1949 : si Blanc tente de capturer, Noir vit quand même, tandis que s'il passe, Noir est considéré comme mort.
Si vous voulez un exemple de forme dont le statut est différent dans la règle de 1949 et celle de 1989, recherchez le précédent appelé "trois points sans jouer".
ConclusionLes règles de la famille chinoises ont du bon.
LiensRègle japonaise championnat du monde amateur :
http://home.snafu.de/jasiek/wagcinf.htmlRègle japonaise professionnelle 1989 :
http://www.cs.cmu.edu/~wjh/go/rules/Japanese.htmlDiscussion Go Seigen contre Takagawa Shukaku :
http://senseis.xmp.net/?RuleDisputesInvolvingGoSeigenCommentaire de partie :
http://jerome.hubert1.perso.sfr.fr/Go/Parties/Takagawa_GoSeigen_1959/Takagawa_GoSeigen_1959_1.htm